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Photo du rédacteurCristina Moscini

Entrevue en trois temps de sobres

Dernière mise à jour : 23 mai



Dans mes récents délires de fièvre*, j’ai pu explorer certes comment la dépendance se sinue un chemin même dans le désir de conserver un virus plus longtemps pour savourer du « buzz » - pas très chic, je sais, mais j’ai aussi eu droit à de belles visions fantasmagoriques. Soit le rêve de toute auteure : un trip à trois, avec soi-même.


L’idée m’est venue dans un rêve, là où je m’exagère le paludisme, mais même en débuzzant un peu quand la température est descendue, j’ai gardé le concept.


[*Texte à venir en avril sur La première grippe d’une dépendante sobre...]


Grâce bien sûr à la magie transcendantale et la logistique de s’endormir en écoutant le film Multiplicité avec Michael Keaton et Andie MacDowell, j’ai eu le privilège de m’entretenir avec mon moi sobre de 2 jours, et mon moi sobre de 5 ans, dans le futur. J’y ai ajouté mon grain de sel du présent, à 2 ans et 1 mois, pour pimenter l’entrevue. J’y étais, après tout, par chance, médiatrice…


Tout ce qui suit est vrai comme je suis là, et n’est certainement pas juste une façon d’illustrer en métaphore personnifiée comment la sobriété et le rétablissement s’installe et évolue en chacun.

Intérieur, jour.

Cristina 2 ans de sobriété déplie des chaises en attendant ses invitées. Elle hésite à les placer face à face, en ligne, mais opte plutôt pour un triangle équilatéral. Cristina 2 jours fait son entrée. Elle ressemble à Cristina 2 ans, mais avec 30 livres de masse de plus sur le corps, et mille tonnes de plus dans l’âme.


2 JOURS : C’est tu icitte, pour la patente ?...

2 ANS : Ouiii ! Bienvenue belle enfant, prends-toi un café, on a des muffins sans gluten, assis-toi !


2 JOURS : Sans gluten ?


2 ANS : Ah, oui, c’est vrai, tu sais pas encore pourquoi ta digestion est fucked up.


2 JOURS : …C’est drôle, je cherchais comme du Cheminaud pour mettre dans mon café.


2 ANS : Ouain, non, on fait pu ça ici, haha !


Les deux s’asseoient.


2 ANS : Pis ? Comment ça va, t’as arrêté de consommer il y a deux jours, c’est ça ? D’abord FÉ-LI-CI-TATIONNN…

2 JOURS : Wewai, ok... merci, mettons, mais ça feele pas trop pour un « win », dans le moment…

2 ANS : Puis-je t’interrompre ? J’a-dore que tu aies utilisé le terme « dans le moment », ça indique déjà cet espoir ou conviction que rien ne dure, comme la douleur, et tout.


2 JOURS : Ouain, si tu veux. Cool. C’est tu normal j’aille le goût de me soûler jusqu’à en mourir, mais en même temps de pu jamais voir une bouteille de proche, genre ?


2 ANS : Ah ! You take me back ! Boop !


Cristina 2 ans tape du bout de son index sur le petit nez de Cristina 2 jours.


2 ANS : Écoute, oui, t’es au début du pire. 2 jours, les substances ont probablement même pas encore fini de sortir de toi, le sevrage s’en vient dans les prochains jours, tu vas caaaaaa-poooooooo-terrrrr ! Hihi !


2 JOURS : Pourquoi je me sens comme si c’était la pire décision de ma vie, mais aussi la meilleure solution de ma vie ?


2 ANS : Tu le sais peut-être pas encore, mais y a une toute autre toi qui existe sans la consommation. Je sais que t’aimes ça te décrire et qu’on pense à toi comme une fille de party, une mascotte, pour échapper à ta condition humaine et transcender la fatalité de ta condition en bâtissant un mythe de fanfaronnerie dans ton comportement, parce que si on ne te prends jamais au sérieux, on n’aura pas à te tenir responsable de quoi que ce soit, right, comme une vraie adulte ?


2 JOURS : WTF ? Mascotte de quoi ? Va chi…

2 ANS : Nenon, relax, c’est pas une insulte, ce que je veux dire, c’est que tu as pris vingt ans à bâtir ton identité dans la consommation. L’idée que... une personne entière existe en toi sans recourir à la substance, et d’être présente pour toi et les autres 24h par jour (soustrais 8 heures de sommeil hihi), semble impossible, mais je suis là aujourd’hui pour t’affirmer que ce l’est !

2 JOURS : 8 heures ? De sommeil ! D’une shot ? No way que c’est vrai.


2 ANS : Man, je te le jure, dans les prochains mois, tu vas découvrir c’est quoi dormir comme un p’tit ange. De te réveiller rechargée au lieu d’encore plus maganée…


Un solo de harpe débute de nulle part. Un nuage cristallin fait son apparition dans le triangle de chaises. En son centre, une onde lumineuse représentant Cristina à 5 ans de sobriété survient avec une chevelure qui flotte au vent. Jésus aurait l’air d’un clodo à côté d’elle.


2 ANS : Ah ! Yay, enfin !


2 JOURS : Mais quessé ça, tabarnaque…

5 ANS : Jeunes sobres, votre passion m’émeut et a réussi à manifester mon énergie positive. Votre vibration a déclenché un nouveau niveau de conscience qui me permet d’être avec vous.


2 ANS : Mais c’est fantastique !


2 JOURS : …Câ-lice.


5 ANS : 2 ans, tu peux pas bulldozer ton positivisme sur la jeune pousse de sobriété qu’est 2 jours. Tu risques de lui faire peur. À ce que je vois t’es encore un peu bloquée dans ton chakra de gorge ? Viens ici voir…


Cristina 5 ans de sobriété empoigne et frenche Cristina 2 ans de sobriété. Elles ont l’air de se trouver de leur goût.


2 JOURS : C’est dégueulasse, mais je peux pas m’empêcher de regarder…

2 ANS : Merci ! Oui, 5 ans, comme tu as raison. Il peut arriver à un certain point dans la sobriété de trouver urgence à rationnaliser tout ce qui arrive. Le "Régler toute tu-suite"...


5 ANS : Tout n’est pas leçon, et certaines réflexions méritent d’être muries plus longuement avant d'être partagées.

2 ANS : Oh, snap ! Es-tu en train de critiquer l’écriture de mon blogue ?

5 ANS : Ton… blogue ? Ah, oui, c’est vrai ! Nous, dans le futur, le notion de travail n'existe plus; on ne fait que charger des quartz et on les revend sous forme de troc pour les biens et services, depuis la chute du gouvernement.


2 ANS : Seems legit.


2 JOURS : Mais la pandémie, c’était pas une affaire de quelques semaines ou quoi ?.... Qu’est-ce que vous me dites pas ?


2 ANS : 5 ans, si tu avais un conseil pour nous aujourd’hui, quel serait-il ?


5 ANS : Alors, pour toi, 2 jours, je te dirais d’avoir confiance en ta force. Sois garantie que la douleur que tu vis présentement va aller en s’estompant, plus rapidement que tu penses. Et journalise comment tu te sens, ça pourra te servir plus tard mais ça te permettra surtout de relativiser. Quelque chose que nous les dépendants, fervents utilisateurs de « toujours » et de « jamais », on n’a pas l’habitude de faire.


Et toi, 2 ans, apprends à conserver tes énergies et accepter que d’autres chemins que le tien fonctionnent, vers la sobriété ou l’équilibre. Des fois, même si notre sobriété va bien après un certain temps, on a quand même tendance à vouloir partir à la chasse, de peur que des problèmes surviennent dans notre cour, ou que les solutions nous arrivent pas assez vite. Tout vient en son temps divin. Et par divin, je ne réfère pas à une déité particulière, mais plutôt au concept de lumières sur un être, et la matière métaphy…

2 ANS : Cool, cool. Merci, sérieux, ça va vraiment m’aider !


2 JOURS : Moi j’ai une question, parz’emple ?


2 ANS ET 5 ANS : Oui ?


2 JOURS : Ouain, pourquoi personne ici m’a frenché ?


2 ANS : Parce que tu sens la boisson jusqu’icitte.


2 JOURS : Legit.


5 ANS : Mais legit enough to quit !


Les trois rient tendrement d’avoir sauvé le monde en 1 meeting.


 


Si vous cherchez des ressources de sobriété, téléchargez l’application I Am Sober, rejoignez des communautés en ligne comme Wassobre, Sober Curious, et visitez naquebec.org pour connaître l’horaire des meetings près de chez vous. Et continuez de lire ce blogue très sérieux.



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