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  • Photo du rédacteurCristina Moscini

Sexe soûl, sexe sobre



En cette grande fête de l’amour commercialisée, parlons-en donc, des rapprochements physiques. La sexualité, dans la lentille de l’alcoolisme et de la sobriété, toutefois. J’en avais déjà abordé un pan au début de ma sobriété dans S’aimer ben paquetée, où j’essayais de comparer comment l’angle charnel se joue en ébriété versus sobre, avec alors peu d’expériences encore pour comparer. Nous voilà un an plus tard, et j’ai eu le temps de… d’accumuler davantage de données (!), et j’ai en plus sondé des communautés de sobres qui demeureront anonymes ici, pour jaser de : Fourrer à jeun, qu’ossa donne ?



En 2022-cent-quatre-vingt-dix, c’est l’heure des communications…

Sur les applis de rencontres (je pense à Hinge, mais je crois que Tinder aussi maintenant), tu peux afficher ce que tu consommes ou pas (alcool, cigarette, weed, pelules), ce qui est chouette, mais même si l'autre personne est sobre aussi, si c'est le seul point que vous avez en commun, ça ne garantit pas une chimie ou connexion, hélas. « Heille, salut, chu sobre aussi ! », de sonner dans tes notifications. So what, Fernand ? C’est personnel à moi, peut-être, mais j’irai pas manger le bat à tous les Roger qui ont coupé sur la Labatt juste parce que moé ‘si. Je dois être une romantique. Certains chercheraient même des applis ou communautés de rencontres amoureuses exclusivement entre sobres. Bof. J’ai pas nécessairement plus envie de fourrer quelqu'un 'parce que' il a le même parcours accidenté que moi.


Cela dit, je pense quand même que c’est une excellente idée de s’afficher la posologie personnelle quand vient le temps de dater, que c’est même important que ce soit su avant des deux partis, dès lors y a pas de surprise ou de malaise quand ton cavalier t’arrive et qu’il t’a commandé un demi de poudre comme entrée (genre). Plus sérieusement, pour moi, c’est important de dire que chu sobre, mais c’est absolument pas un prérequis pour l’autre. Même que, statistiquement, je réponds encore systématiquement plus aux énergies de ceux qui boivent, pour en reconnaître mieux à ce jour la familiarité ou la robuste camaraderie dans les élans. Ou alors c'est de pouvoir licher le brandy sur leurs lèvres. (Joke, mais on y reviendra...) Jai pour mon dire que c’est pas parce qu’un gars a choisi le kombucha comme philosophie de vie qu’il est un jésus en culottes de velours qui mérite de se faire sucer tous ‘es matins, et c’est pas parce qu’un autre tinque de la double IPA que c’est un vilain qui mérite des coups de pieds dans la poche. (*Adaptez ça vous-même au genre qui vous plaît, ça demeure pareil.)

Mais on s’entend que tout est équilibre, complémentarité et limites : il sera tout à fait possible de bécoter un Jean-Steve après deux pintes de rousse, mais peu probable que ça connecte avec Carl-Étienne qui a des tics de mâchoire d’être accoté sur la pinotte 24/7.


Si vous dites préférer une personne sobre de peur de vous faire juger par une personne qui consomme, c'est que cette personne n'est peut-être juste pas pour vous. J'ai parlé à des couples dont une seule personne est sobre, et, toujours, dans ces cas, c'est la personne sobre qui influence l'autre à moins consommer, plutôt que le ou la buveur/buveuse qui met la pression sur le sobre.


Là aussi ce qui est intéressant, c’est de fraterniser de la face ou des orifices avec quelqu'un qui n'est pas sobre (chaud consentant et pas soûl mort, on s'entend) quand nous, on est à jeun. Le goût de la boisson sur l'autre, le mood comme être dans deux dimensions. Pas impossible, mais différent. J’ai cette impression qu’y a comme un précipice jusqu’à X consommations pour demeurer en communion avec l’autre. Le même précipice en fait, qui fait qu’on peut tenir une conversation avec quelqu’un qui boit jusqu’à temps que notre vis-à-vis se mette à radoter les mêmes histoires, postillonner, renverser ses verres, uriner en public, rouler dans le ravin, tsé, un petit mardi.

J’ai été chanceuse depuis que je suis sobre, de tomber sur du monde qui savent se comporter en buvant, et j’ai pu, grâce à ça, continuer de cheminer dans ma sexualité sans affronter dans le ring du drap contour, des caractères ~mettons~ comme le mien quand je buvais. Une estie de chance.

*


Fourrer à jeun, c'est aussi réaliser que plusieurs fois dans le passé, de l’adolescence à l’âge adulte, j'étais pas en état pantoute pour être participante active, que j’aurais pas dû avoir des rapprochements. Une des raisons était que j’en étais physiquement incapable pendant l’acte, et que j’ai continué quand même, malgré tout. Genre aussi cave et sans bonne raison que d’essayer de gagner un concours de sifflage quand on revient tout juste de chez le dentiste la yeule tou’ gelée avec nos molaires dans un ti-sac. Au mieux, pas grâcieux, au pire, cauchemardesque.


Une sobre raconte, sexe soûl versus sobre : « C’est compliqué. Je peux dire que je ne ferais pas 10% de ce que j’ai fait drunk. Je préfère sobre. »

Aussi, on se doit d’aborder le moins comique et tout ce qui entoure la coercition et la pente dangereuse quand on est paqueté.e et/ou avec un.e partenaire paqueté.e, tsé les comportements à risque, etc. Ou être paqueté.e à proximité d’un criminel sexuel. Je me souviens d’une de mes premières brosses à 13 ans dans un party, j’avais la tête dans bol à genoux, à cracher de la bile jaune Tornade sur fond de ‘Hit’em up style’ de Blu Cantrell et y a un gars qui est venu en arrière de moi comme me scooper mes boules et qui a commencé à me peloter pis me bécoter. Pendant je vomissais. J’étais consciente, heureusement, pour repousser ce goujat, mais tsé. Tsé. Trop beaucoup de nous savons que de baisser la garde un bref instant, c’est avoir une mire phosphorescente qui nous apparaît dans le chest. Heureusement, j’ai découvert la cocaïne et les amphet’ pas longtemps après. C’est plus difficile à pognasser de force, une fille pas tuable de broue.


Mais tsé, boire c’est tellement le fun.


« Ah, c’est sûr c’est plus facile toute quand t’es un peu réchauffé.e ! », mais c’est aussi toute plus dangereux. C’est de même que les bébés se font, on se pense tellement invincible. T’as juste à ne pas me viendre dedans, qu’on peinturera en lettres attachées dans la chambre de notre enfant. Comportements à risque aussi, comme on ne se respecte plus les limites non plus. On peut se faire profiter de. On peut vivre l’horreur. Et même si on a la chance de ne pas tomber sur un criminel, on peut être en danger physique de toute sorte et de tout angle de culbutage. Les accidents sexuels qui amènent du monde à l’urgence, fort à parier qu’ils n’en sont pas à la camomille avant d’avoir besoin de se faire excaver ampoules ou jouets coincés dans l’oignon.


J’ai déjà parlé à un gars qui avait perdu un orteil en fourrant sa blonde ben soûl, en levant et s’échappant une base de futon sur le pied. Perdre un orteil, sacrament.


Fourrer soûl pis rien sentir. Ne pas entendre nos signaux. À moitié-morte en train de se faire driller, la tête qui sort et pend en bas du matelas pu de couvarte, et pis vomir, la caboche à l’envers. Tu peux mourir de d’ça, t’sais. Comme Bon Scott de AC/DC, à peu de détails près. Imagine comment t’aurais l’air cave aux funérailles. « Ah, pauvre Pétunia, à se faisait remplir ben soûle pis elle s’est étouffée en dégueulant ».



« Je suis venu, je bois pu… pis je viens dru ! »

- Jules César, quand il a arrêté de boire.


Un gars raconte :

[En arrêtant de boire] « En tant que gars, la peur de ne pas durer assez longtemps. Lorsqu'on est sous les influences de substances et d'alcool, l'acte dure beaucoup plus longtemps, mais ce n'est pas du tout la même expérience qu'à jeun ou sobre. J'ai comme l'impression que quand on baise lorsqu'on est chaud, c'est plus comme fourrer de façon animale. Lorsque tu es à jeun, c'est une expérience plus vraie et intime. Rien n'empêche d'être plus intense lorsqu'on est à jeun. »


Ici, ça me semble assez valable pour les deux sexes; l’engourdissement de l’alcool et des drogues ne se passe pas uniquement dans la tête, mais dans le corps au complet y compris les organes génitaux. Qui peut se vanter de jouir à chaque fois en fourrant soûl.e ? On devient anesthésiés, amnésiques, narcoleptiques, mous, hors focus. Comme essayer de percer de la barbe-à-papa avec une fleur fanée. (*J’ai vraiment essayé longtemps de trouver une image d’inefficacité ludique, et celle-là est la moins pire, désolée.)


En étant sobre, à deux ou seul, c’est se redécouvrir les sens et revivre une sorte d’adolescence, une deuxième puberté. On vient de rien. Au début surtout. Parce qu’après tant d’années à calfeutrer toute sensation plaisante sous des litres lénifiants, les mêmes sensations se font forcément maintenant plus vives, à cru. C’est fou raide, soyez prévenus. Pratiquez-vous sur du monde de confiance ou sur vous même avant de sortir, si vous êtes en début de sobriété et en pré-dating. Mais tenez vous le pour dit que vos premiers orgasmes en sobriété auront l’intensité amplifiée d’une déferlante, et viendront plus vite qu’anticipés.


Aussi pour moi étant la plupart du temps célibataire parcimonieusement épivardée, le plus flagrant c'est que mon jugement est passé de 'bah, pourquoi pas' à 'mais pourquoi je ferais ça'? On devient plus sélectif.ve je crois, et ~peut-être que c'est de vieillir aussi et de 'maturer'~ mais j'en suis venue à considérer davantage les rapports charnels comme d'importants transferts d'énergie, ipso fuckto; on ne veut plus se délester de nos énergies sur n'importe qui, je pense ben...


Une fille raconte :

« La peur de la platitude se dissipe avec le temps, mais j'avoue qu'au début c'était comme l'avoir toujours fait dans le noir et soudain quelqu'un allume la lumière (genre des néons poches !). Sinon, la dépendance et le rétablissement sont tous les deux l'ensemble de notre oeuvre, des comportements qu'on applique à tous les domaines de notre vie. Donc, je suis devenue forcément moins à la recherche de l'autodestruction pis de l'arrachage de mur sur le plan sexuel aussi. Si mon partenaire est crinqué et veut que ce soit intense, je peux jouer le jeu et trouver ça le fun aussi, mais je continue de réfléchir rationnellement malgré moi en essayant de pas être trop ailleurs. »



Tu fourres pu comme avant…

(Car c’est plus simple, quand on ne voit plus double.) 🥁


J’ai eu un partenaire épisodique qui m’a connu (au sens biblique hihihi) soûle et à jeun, et qui a constaté que mon énergie avait changée. Que ça connectait même mieux. Je comprends, esti, j’étais enfin ‘en état’… J’ai pu enfin servir d’être humain qui s’accouple au potentiel de sa splendeur cérémonieuse, au lieu de ma motricité d’alors de clown qui déboule des escaliers infinis sur les bizounes du monde, une tarte à la crème et un bouquet de ballons dans chaque main pis un bruit de gazou et de tambours quand elle tombe. (imagé.)


Un autre sobre conclut : « Tant que les deux soient à l’aise, sobre c’est vraiiiment plus nice…»


Je t’aime moi non plus, je bois pu…


Au final, j’ai pour mon dire personnel, que la sexualité, avec ou sans substance, se doit en priorité d’être mieux enseignée dans les écoles, plus illustrée, normalisée.


Ensuite, quand elle entrera dans nos normes et habitudes, que l'on consomme ou non, on sera en mesure de mieux la vivre sainement, et signaler ce qui ne va pas. Puis, dans cette utopie de baisodrome du futur, on n’aura même plus besoin de substances altérantes pour s’envoyer en l’air; le moment présent sera déjà assez trippant, et beau, qu’on voudra pas le quitter, pour aucun artifice, ni aucun de nos schémas platement mécanisés. On célèbrera ces sensations sans les filtrer dans la brume de nos mœurs intoxiquées.

*


Bonne Saint-Valentin, et bonne exploration !


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