TOP 5 des clichés de sobriété, Debunkés par une sobre
Me voilà à 978 jours de sobriété, au moment où j’écris cet article, c’est pas peu de choses, chose ! Je n’ai jamais été sobre aussi longtemps depuis mes douze ans. Et avec tout ce temps sans lendemain de brosse, vient inévitablement une sagesse et une suffisance qui m’enjoigne à cérémonieusement partager mes conseils et expériences sur ce blogue, telle une experte non-certifiée et fanfaronne.
Peu importe où je lis sur la sobriété, peu importe la plateforme où je regarde des vidéos sur la sobriété, les mêmes commentaires semblent revenir.
Folklore, mythes, idées préconçues, réalité ? Qu’est-ce qui est vrai, qu’est-ce qui l’est pas ?
On démêle ça un peu, dans ce…
TOP 5 des clichés de sobriété
1. « Tu vas remplacer par autre chose ! »
Ça, ça sort de la bouche d’un jaloux qui sous-jace le transfert de dépendance accoté.
Est-ce que ça se peut ? Oui. Est-ce inévitable, le transfert de dépendance ? Non. Il est possible d’entamer sa sobriété armé de vigilance et d’écoute de soi.
Ce que je recommande de faire est de journaler ce que vous faites dans une journée, comment vous vous êtes senti, ce que vous avez fait comme activité. L’application I Am Sober permet de le faire très simplement et c’est gratuit. Un bel outil, créé spécialement pour les nouveaux sobres, ou ceusses qui veulent s’y essayer.
En gardant conscience de ce qu’on fait ou on ne fait plus, toute différence dans notre comportement ou nouvelles habitudes (activité physique, finances, alimentation) sortant de l’ordinaire pourra être traçable, si on est honnête avec l’application, et avec soi-même.
2. « Tu vas te garrocher dans le sucre. »
En coupant drogues et alcool, la personne dépendante se tourne irrémédiablement vers le sucre.
Est-ce que c’est vrai ? C’est possible, mais pas incontrôlable.
Pour moi qui a toujours été une personne qui ne voyait pas l’intérêt des aliments ou boissons sucrées, j’ai développé le goût du café aromatisé d’un peu de creamer à saveur de pumpkin spice et autres niaiseries. Est-ce que je me pique dans le bras avec l’usine de bonbons Mondoux™️ distillée dans une cuillère ? Non. Alors y faut pas capoter, non plus.
Si vous étiez pas terriblement sucré avant, il se peut qu’il n’y ait pas grand différence. Pour moi, de la crème à café végane aux arômes de caramel usiné, c’est pas mal le plus rock bottom que je suis allée. Mais reste que je n’avais pas le goût de ça le matin quand je buvais. Pourquoi ? Parce que le matin, quand je buvais j’étais soit terriblement lendemain de brosse et j’avais le foie qui tremblait comme une feuille en me rendant à l’école ou au travail, ou je commençais déjà à boire, avec du fort ou du vin caché dans une bouteille de jus, une gourde, un thermos. Ou les trois. Fun !
En gros, je dirais de ne pas s’inquiéter si vos habitudes alimentaires changent un peu en devenant sobre, c’est quand même tellement de changements en peu de temps, givons nous ourselves a break, en bon français ! Et tsé, mettre tout ça dans la balance : Sniffer du speed dans les toilettes du bar à 16h45 après ta huitième bière, ou manger une Oh! Henré ? Faut peser honnêtement les dommages collatéraux, tsé.
Si certes le sucre de l’alcool constitue une accoutumance qui voudra possiblement resurgir ailleurs, je m’en veux d’être Josée Lavigueur-Isabelle Huot ici, mais essayer de se garrocher sur une pomme avant des sucreries industrielles fabriquées mécaniquement. Ou si vous trippez vraiment bonbon, faites-les vous-mêmes; vous avez le temps, vous êtes sobre, calvaise ! Se gosser des Turtles™️ aux pacanes sul’ papier parchemin avec fond de musique de Noël aurait tout de même plus de cachet que la boîte qui attend de se faire acheter à rabais depuis 2017 sous les néons d’une pharmacie. Mais encore, à chacun son nanane, littéralement.
Encore une fois : mesure, vigilance, et I Am Sober aussi, pour tracker les occurrences de ces envies. Faites des liens; est-ce relié au stress ? Qu’est-ce qui se passe d’autre dans votre vie à ce moment ? Soyez votre propre psy, soyez mémère avec vous-même, mêlez-vous de ce qui vous regarde et dicte vos décisions.
3. « Tu pourras pu jamais boire de ta vie. »
Comme quoi arrêter de boire, c’est quelque chose comme une éternelle condamnation.
Sais-tu, pour moi, c’est correct de même.
Je reste sceptique quand des gens qui ont connu des problèmes de dépendance recommencent à consommer de façon modérée. Mais je suis pas dans leur tête, je suis pas dans leur corps. To each their own. Souvent, ce sera des personnes qui avaient plutôt un problème avec les drogues dures qui se diront clean en buvant encore du vin pis de la bière. Ou du monde plus alcoolique qui continueront à fumer du pot.
C’est une zone complexe.
À la rigueur, me connaissant alcoolique et pas tant attirée par les drogues qui n’étaient que le Robin à mon Batman de boisson, ou les Michelle et Kelly de ma Beyoncé de bouteille… je sais que je pourrais pogner une poffe du joint qui circule et que je ne virerais peut-être pas ma vie à l’envers. Mais je n’y vois pas l’intérêt. Et aussi, côté consommation, comme beaucoup de dépendants devenus sobres : j'ai en masse déjà donné.
J’ai pris goût à l’idée de la sobriété, à la capacité d’avoir la tête claire en tout temps, d’arrêter d’être mêlée à toute heure du jour et devoir retracer mes pas le lendemain, comme si j’avais été possédée par la plus pocharde des loups-garous. J’ai aussi pas le goût de prendre le risque. Ce qui m’amène au point suivant…
4. « T’as juste à boire raisonnablement. »
Parce qu’on est maître de soi, après tout, non ?
Est-ce qu’une personne dépendante est physiquement capable de s’abstenir de consommer ? Juste quand elle sera vraiment prête, je dirais.
Je vois circuler des témoignages qui glorifient le « ré-apprendre à boire modérément » selon votre ascendant du zodiaque, avec méditation et cristaux de choix.
Esti.
S’entêter à boire quand même quand il est clair que nous avons une dépendance est de jouer à la roulette russe. C’est risqué pour erien, et pis c’est cave, bon. Comme être allergique aux fruits de mer pis aller traîner tous 'es jours au Red Lobster. Ou en fait, plutôt, je sais que ce serait impossible pour moi, et tous ceusses qui vivent la dépendance de façon semblable à moi (c’est à dire la dépendance ordinaire). S’affirmer au-delà de la condition humaine en disant « ne-non, moi je suis pas comme les autres dépendants, MOI je suis capable de déjouer cette condition complexe tressée dans les traumas, l’hérédité, l’environnement, cette condition dont plusieurs meurent depuis toujours, parce que j’alterne avec de l’eau maintenant ! »… ça relate de naïveté, d’imprudence, surtout. Je choisis de ne pas gambler sur ma capacité de rechuter parce que j’ai voulu me prouver que je déraperais pas pour un rhum and coke.
5. « Tu vas devenir plate. »
Bonsoir party animal, bonjour adulte responsable !
Mauvais nouvelle : Oui, c’est vrai, vous allez devenir un peu plate. Mais par plate, j’entends que vous ne déboulerez plus des escaliers pour le fun, vous ne mettrez plus votre corps dans des endroits exigus pour faire rire la compagnie, vous ne volerez plus de panier d’épicerie pour descendre un boulevard à minuit, vous ne copulerez plus dans des endroits publics de façon animalière, vous ne frencherez plus avec quelqu’un sorti de prison depuis une heure pour le regretter, vous ne dépenserez plus des sommes folles dans les bars et restaurants, vous ne serez plus mis à la porte des tavernes, on ne vous demandera plus de baisser le ton car vous faites peur aux autres clients, vous ne serez plus comme ça.
Par plate, j’entends que vous allez aussi cesser de voir certains amis, pas parce qu’y a de la chicane ou quoi que ce soit, mais l’idée de la tranquillité commencera à prendre du galon dans vos priorités. Vous allez cesser d’avoir le FOMO « fear of missing out » de ce qui se passe ailleurs, vous allez vouloir passer du temps avec vous-même, pour guérir, vous redécouvrir, et vos proches, avec parcimonie, même.
Devenir sobre, c’est un cristie de gros bouleversement, on ne vous en voudra pas. Vous avez fait le choix de demeurer en vie, félicitations ! Y a pas de quoi s’en sentir gêné.
Et si c’est ça être plate, ben amenez-moi à Puerto Plata, tideli-di. (*Ah, oui, aussi, vous allez devenir Ned Flanders à 100%. C’est obligé. Juré.)
28 NOVEMBRE…
Iiiiiih, ça s’en vient. La belle Ariel Charest mémorise ses lignes à l’heure qu’il est ! Mis en scène par la talentueuse Pascale Renaud-Hébert (Théâtre La Licorne, Théâtre Kata), mon monologue sur la boisson et la sobriété, S’aimer ben paquetée, sera présenté au Théâtre La Bordée à Québec du 28 novembre au 16 décembre. Les billets sont autour de 25$, et c’est présenté dans le cadre des 5@7 théâtraux.
C’est personnel, c’est drôle-triste-cru, c’est croustillant. C’est dru ! Allez-y. BILLETS.
T-SHIRTS & PLUS...
Beaucoup de rabais dans ma petite boutique de sobriété Etsy !